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La serre en climat équatorial

J'aimerais cultiver des légumes (tomate, piment, aubergine et laitue) sous serre pour régler les problèmes de lessivage excessif, de maladie phytosanitaire, de désherbage et donc finalement de main d'oeuvre très coûteuse dans mon pays.
Je compte mettre en place un système d'irrigation goutte à goutte de type gravitaire car j'ai suffisamment de pente et de disponibilité en eau. La serre ne va t elle pas empêcher la pollinisation d'une part et ne va-t-elle pas favoriser une température élevée limitant ainsi le développement de la plante ?


Une réponse



En climat tropical ou équatorial, sans risque important de cyclone ou de fort coup de vent, un abri plastique bien ventilé permet une protection efficace des cultures maraichères et florales fragiles. Le choix peut se porter sur des abris de type multichapelles, sans parois latérales ou constituées en partie ou en totalité de filets brise-vent. La largeur de l'abri doit être limitée (quelques dizaines de mètres), chaque chapelle étant équipée d'un ouvrant continu en toiture. L'essentiel est que l'aération soit la plus importante possible. Les ouvrants en toiture ne sont pas nécessaires si la largeur de l'abri est limitée à une quinzaine de mètres. Bien s'assurer que l'écoulement des eaux de pluie sera correctement géré (largeur et longueur des chéneaux, émissaires suffisants, drainage autour de l'abri...). Un tel abri, relativement simple, ne permettra pas bien sûr d'abaisser la température ambiante, mais celle-ci devrait rester proche de la température extérieure ; il permettra surtout une protection contre les fortes précipitations.



En ce qui concerne l'irrigation, le goutte à goutte est tout à fait approprié. Vérifier cependant que le dénivelé est suffisant pour assurer une pression correcte au niveau des goutteurs, sachant que les pertes de charge sont importantes dans l'ensemble du réseau. Ne pas oublier d'installer en tête de réseau une filtration efficace de l'eau pour éviter un bouchage des goutteurs; de même il serait aussi intéressant d'installer un système simple de fertilisation pour fabriquer une solution nutritive; mais cela demande un peu plus d'équipements et de fournitures (pompe doseuse, conductivimètre, engrais solubles,...).



La serre : une solution en zone équatoriale pour produire des légumes ?



-Effet sur le lessivage excessif :

Oui la couverture de la serre limite l’érosion sous la zone abritée, mais l’eau de pluie se concentre au périmètre externe, il faut donc veiller à son évacuation. Cela dépend de la surface que vous souhaitez couvrir.



-Effet sur les maladies phytosanitaires :

Les bioagresseurs fongiques ou bactériens pourront trouver sous votre serre un climat plus humide à certaines périodes de l’année, ce qui pourra  favoriser leur développement. Afin d’y pallier, Il conviendra d’aérer au maximum les abris. C’est la raison pour laquelle, les abris en zone équatoriale sont ouverts sur les côtés afin de favoriser l’aération, et un voile insect-proof est souvent mis en place pour éviter l’entrée des insectes, notamment vecteurs de virus.

Par contre, à d’autres périodes, les plantes protégées des fortes pluies seront beaucoup moins exposées au parasitisme des bactéries et des champignons aériens qui ont besoin d’eau sous forme liquide pour pénétrer les feuilles; sous réserve effectivement que l’irrigation soit apportée sous forme localisée, sinon gravitaire.

Si votre serre est très exposée au soleil, les températures ambiantes pourront être très élevées malgré l’aération, ce qui pourra être limitant pour certaines espèces légumières. C’est la raison pour laquelle, les producteurs ombrent sous climat à fort rayonnement (blanchiment, etc.). Soulignons que certaines espèces ne supportent pas un ombrage trop important : donc modulez le en fonction de l’espèce produite.



Pour la tomate, vous risquez d’augmenter, sous serre, l’occurrence de surtout de maladies fongiques (Corynesporiose, Cladosporiose, Oïdium, etc…).



-Effet sur le désherbage

Les adventices auront une croissance plus rapide sous serre;  il y aura moins d’entrée de graines d’adventices du fait du couvert, et surtout la pratique de l’irrigation localisée limitera la germination aux seules zones irriguées. Si vous désherbez ou paillez avec continuité, progressivement le réservoir de graines d’adventices se  réduira, sur plusieurs années.



-et donc cela vous coutera t il moins de main d'œuvre ?

Il faut expérimenter, selon vos conditions de production. D’une manière générale, l’artificialisation des conditions de production génère souvent des problèmes autres et plus difficiles à contrôler.



-« La serre ne va t elle pas empêcher la pollinisation d'une part ? »



La tomate et la laitue sont des espèces suffisamment autogames : le pollen d’une fleur pollinise suffisamment ses propres organes femelles. Il y aura bien fécondation sans besoin d’insecte.

Pour la tomate, si le climat est trop humide, le pollen sera insuffisamment sec, il faut donc l’aider le matin pour aller se déposer sur le style, en vibrant les inflorescences.

Sous climat tropical, et selon les zones, il existe un insecte pollinisateur de la tomate qui aidera à la fécondation si le style de la fleur est suffisamment externe au cône des anthères (cela dépend des variétés). Sous insect proof vous empêcherez l’insecte de polliniser, si il n’est pas dans la serrre.



Pour la Laitue, si il s’agit de produire des « pommes », vous n’avez pas besoin d’attendre ce stade floraison, donc le facteur « pollinisation » ne sera pas déterminant .



Pour l’aubergine et le piment, ce sont deux espèces moins autogames et pour lesquelles on observe à la fois de l’autofécondation ( alors pas de problème pour vous) et selon les environnements la nécessité d’une pollinisation croisée (insectes ou vent). Pour le piment aussi il faut favoriser un climat moins humide pour permettre au pollen d’être plus volatile.



Conte tenu de ses contraintes, les chercheurs ont sélectionné des variétés adaptées à ces conditions de croissance à forte température et humidité. L’INRA (et le CIRAD) a créé du matériel adapté (Tomate Caraïbe, Piment Narval, Aubergine Kalenda…), des sélectionneurs aussi (Technisem; East and West seed cy…). Pour l’aubergine, les variétés asiatiques sont en général bien adaptées à ce type de climat.

Contactez MC.Daunay INRA.



« et ne va-t-elle pas favoriser une température élevée limitant ainsi le développement de la plante »

Les plantes au contraire se développent plus rapidement. En laitue, il faut des variétés très adaptées, car la pomaison a de telles températures et photopériodes est difficile, sauf si vous produisez des laitues sans pomme.


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