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Le savoir au Jardin

Les experts de la SNHF vous répondent

Orme au Grand Siècle

Bonjour,

que disait André Le Nôtre sur les ormes ? Pourquoi avait-il choisi cette essence pour ses alignements et mails ? Quelles préconisations faisait-il ? Comme vous le savez, les ormes ont été décimés par deux épidémies de graphiose consécutives. Ils étaient présents dans les jardins de Le Nôtre : Le long du Grand Canal de Versailles, ainsi que celui du parc de Sceaux. Vous remerciant par avance,


Une réponse



L'orme et le tilleul sont deux essences dont les performances techniques ont toujours été appréciées par les paysagistes. La qualité de leur bois, utilisable en différents usages, leurs dimension adulte, leur capacité à se plier aux tailles répétées, leur tolérance relative à des transplantations à l'état de gros sujets expliquent ce succès.



C'est ainsi que vers 1600, Sully, le célèbre ministre de Henri IV, fit planter de nombreux ormes le long des routes, en vue d'une production ultérieure de bois d'œuvre. Le Nôtre et ses jardiniers ne firent que suivre la voie de ses devanciers et, malgré l'introduction de nombreux arbres exotiques, l'orme resta l'une des essences majeures des parcs jusqu'à la fin du 19ème siècle.



Les Ormes possèdent comme toute plante, leur cortège de prédateurs et parasites. Le plus célèbre fut la Galéruque, petit coléoptère creusant des galeries sous l'écorce et véhiculant divers champignons par la même occasion. On accuse la Galéruque d'être ainsi le principal vecteur de la Graphiose, ennemi mortel des Ormes. Ce champignon se développe dans les vaisseaux du bois et intoxique son hôte.

Les premières manifestations épiphytiques (terme équivalent d'épidémique chez l'homme) apparurent après la guerre de 1914-1918, comme une conséquence de cette dernière, ce qui était évidemment faux. Particulièrement sévères aux Pays-Bas, elle reçut le nom de maladie "hollandaise" des ormes (Dutch ulm disease).



En fait, l'observation attentive de tableaux anciens représentant le parc de Versailles montre que certains ormes y étaient malades dès le 18ème siècle, sans que l'on s'en préoccupe particulièrement. La maladie de l'orme n'est évidemment pas une nouveauté, mais tout comme le font les autres agents pathogènes (y compris la grippe !), elle mute spontanément en produisant de nouvelles souches aux effets potentiellement plus dévastateurs.

C'est ainsi que la quasi-totalité des espèces d'ormes sont actuellement décimés au plan mondial. Des sélections faisant entrer dans les croisements l'orme à petites feuilles (Ulmus pumila), originaire notamment de Sibérie et relativement indemne, s'avèrent résistantes à la Graphiose. Ces nouveaux ormes de la série 'Sapporo' restent malheureusement de dimensions modestes et ne sauraient remplacer les ormes de nos parcs classiques.


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